Ce matin, j’ai tiré sur la ficelle de mon ventre.
Et toute la pelote est sortie.
C’était une pelote grise.
Une boule lourde au fond de mon ventre.
Une grosse pelote.
Avec de petits nœuds remplis de larmes.
Des nœuds épais et malheureux.
Des nœuds piquants et brillants.
C’était tout mon chagrin.
Ce matin, j’ai tiré sur la ficelle de mon ventre.
Et toute la pelote est sortie.
C’était une pelote jaune.
Une boule brûlée au fond de mon ventre.
Une grosse pelote.
Avec des cris à l’intérieur.
Une pelote bouillante.
J’ai tiré doucement pour ne pas me brûler.
C’était toute ma colère.
Ce matin, j’ai tiré sur la ficelle de mon ventre.
Et toute la pelote est sortie.
C’était une pelote bleue.
Une boule gelée au fond de mon ventre.
Une grosse pelote.
Avec un grand vide au milieu.
J’ai tiré de toutes mes forces pour faire fondre la glace.
Pour que le trou disparaisse aussi.
C’était toute ma peur.
Ce matin, j’ai tiré sur la ficelle de mon ventre.
Et toute la pelote est sortie.
C’était une pelote rouge.
Une boule coupante au fond de mon ventre.
Une grosse pelote.
Avec de petits clous dedans.
Des clous pointus et têtus.
Des clous piquants et malheureux.
C’était toute ma douleur.
Chaque matin, j’ai tiré sur les ficelles de mon ventre.
À force de tirer, toutes mes pelotes sont venues.
Tout est sorti.
Mon chagrin.
Ma colère.
Ma peur.
Ma douleur.
Benoît BROYART